La vie à bord, la navigation et l'accostage

Quelques détails sur la vie à bord du Hertog. Le bateau est plutôt pratique et il y a tout ce qu'il faut pour y vivre confortablement : banquette-salon, coin table, cuisine avec trois becs de gaz et évier, frigo, chauffage, sanitaires avec toilette, douche et évier, lit double permanent à l'avant, terrasse avec banquette et qui peut être couverte à l'arrière. Inutile de dire qu'on n'en a Pas profité des masses cette semaine...

Le truc chouette, ce sont les grandes vitres dans la cabine principale qui offrent une super visibilité.

Le poste de pilotage (avec la vraie barre qui en jette) est à l'intérieur et vu le temps qu'il fait, on ne regrette pas un seul instant de ne pas avoir choisi un modèle avec commandes à l'extérieur.

Les batteries du bateau permettent théoriquement une certaine autonomie et donc de ne pas devoir accoster dans un port tous les soirs pour se brancher sur le courant. Mais avec le froid qu'il fait maintenant, on est obligé de chauffer toute la soirée et toute la nuit, ce qui viderait les batteries en quelques heures. Du coup, on doit quand même trouver un branchement chaque jour. Dommage car s'il faisait meilleur, on pourrait s'amarrer dans des endroits isolés en pleine nature. Les ports, ce n'est pas toujours le top question paysage.

Pour la navigation, ça commence par un coup d'œil sur la carte pour choisir l'itinéraire en tenant compte de la profondeur des canaux et de la hauteur des ponts qui ne sont pas mobiles. Ça se joue parfois à quelques centimètres. On est passé sous un pont qui faisait à peine 25 cm de plus que le bateau et croyez-nous qu'on retient sa respiration au moment de s'engager ! Il faut aussi déterminer la durée de la navigation sur la journée. De notre côté, on voulait se limiter à 3 ou 4 heures par jour. La vitesse maximale sur les canaux et les lacs est généralement comprise entre 6 et 9 km/h, pas de quoi être décoiffé donc. Sur ce point là, c'est plutôt pépère comme activité.

Par contre pour les manœuvres, c'est quand même du sport. Pour l'accostage, on n'est pas trop de deux : moi je "gère" l'approche à la barre et Romy saute sur le quai et se charge de maintenir le bateau contre le bord et de commencer à l'arrimer. Ça se corse quand il y a beaucoup de vent. Ce qui n'est pas simple non plus, c'est de manœuvrer dans les voies étroites à l'intérieur des ports. C'est surtout stressant de frôler les autres bateaux qui mouillent là, encore plus quand ce sont des gros yachts. Au final, on s'en est plutôt bien tiré pour deux marins d'eau douce tout à fait novices.

Journal de bord, le 5 avril de l'An de grâce deux Mil douze

Après un bon eggs & bacon au petit dej', on est d'attaque pour une balade à vélo d'une vingtaine de km dans le parc naturel De Wieden. Il fait gris, venteux et froid mais sec. On se console comme on peut. Une halte pour se réchauffer avec un chocolat chaud et un morceau de tarte aux pommes façon Oma. Retour face au vent comme il se doit mais on a tenu bon jusqu'au bout cette fois.

L'après-midi, le soleil daigne enfin se montrer timidement. On en profite pour retourner se promener le long des canaux à Giethoorn. Y a pas à dire, c'est vraiment charmant et ça mérite tout à fait le surnom de Venise à la sauce hollandaise.

On prend notre douche aux sanitaires du port comme c'est l'usage ici. Il y en a bien une sur le bateau mais c'est très petit et la réserve d'eau est quand même limitée. À 50 cents la douche, on n'est pas ruiné sauf que moi je dois toujours remettre une pièce alors que Romy se contente d'une seule... pour la même durée. La vie est parfois injuste, même dans les douches des ports.

Et avec ça, c'est déjà la dernière soirée à bord...

Journal de bord, le 4 avril de l'An de grâce deux Mil douze

La pluie est tombée une bonne partie de la journée aujourd'hui et surtout ce matin... cinq minutes après qu'on aie enfourché nos vélos pour faire une balade dans le parc naturel De Weerribben. Après quelques kilomètres, on est déjà trempé jusqu'aux chaussettes. Faut dire qu'on les porte aux mains en guise de moufles improvisées... L'endroit est très sympa mais ça caille vraiment trop. On a même droit à de la grêle. Un raccourci nous permet d'éviter les 23 km initialement prévus et d'aller nous réchauffer au bateau. Ce coin mériterait d'être revu sous le soleil.

Pendant notre absence, le mécano est venu remplacer la pièce défectueuse mais quand on arrive, il appelle pour dire que c'est en fait l'hélice de l'étrave qui ne fonctionne plus. Seule solution pour réparer, sortir le bateau de l'eau ! Ou continuer sans, comme on le fait depuis deux jours. Pas vraiment le choix puisqu'on n'a pas envie de perdre encore des heures avec ça.

On largue donc les amarres en début d'après-midi pour Giethoorn, la Venise hollandaise. Ça nous fait une toute petite étape de même pas deux heures. D'abord un point carte comme chaque jour pour préparer l'itinéraire. Ensuite, navigation sans histoire de même que l'arrivée au port à Giethoorn. Accostage nickel chrome, c'est qu'on commence à avoir la main !

À peine débarqué, on retente le coup du vélo mais sans pluie cette fois pour faire un premier repérage des lieux. Assurément plus touristique ici même si c'est encore fort calme en ce tout début de saison. On y croise même quelques Japonais. Faut dire que c'est hyper charmant mais on approfondira demain sous le soleil puisqu'on nous annonce une amélioration du côté de la météo.

Au menu ce soir, champignons à la façon du commandant Cousteau !

Journal de bord, le 3 avril de l'An de grâce deux Mil douze

Ce matin, malgré une nuit complète de branchement sur le courant, le moteur d'étrave ne fonctionne toujours pas. Ce n'est donc pas un problème de batterie. Un coup de fil au loueur et il envoie un mécano. Après deux bonnes heures d'investigations, le verdict tombe : helemaal kapot ! Faut remplacer toute la pièce. Tant pis, on a déjà perdu une matinée, on ne va pas attendre la pièce de rechange ici. On naviguera encore sans aujourd'hui et il viendra la remplacer demain à notre prochaine étape.

C'est donc parti pour trois bonnes heures de navigation pour rejoindre Ossenzijl. Sur notre chemin, on débouche sur le Tjeukemeer. Le soleil pointe son nez et il n'y a pas un pet de vent. Pas un bateau non plus sur cet immense lac à part nous. On se laisse dériver quelques minutes moteur à l'arrêt, histoire de faire une pause thé et de profiter de la beauté de l'endroit.

Le stress remonte d'un cran au passage de notre première écluse. Heureusement, le dénivelé ne fait que 40 cm et donc on en est vite ressorti... dans un style moyennement académique toutefois.

On se trouve une place pour notre escale à la plutôt chique Contessa Marina. C'est la première fois qu'on rentre vraiment à l'intérieur d'un port avec des emplacements côte à côte comme sur le parking d'un supermarché. On y va donc molo. Finalement, on s'en sort très bien et le Hertog vient se garer en douceur à côté des gros yachts qui mouillent ici.

Au soir, on s'offre un resto, le seul ouvert dans ce bled. Pas terrible du tout. En revenant au port, la grille est fermée et c'est la que je me souviens de la feuille avec le code d'accès que le havenmeester m'avait donnée plus tôt... et qui est restée dans le bateau ! Je pensais que c'était pour entrer dans les sanitaires la nuit. On a dû se la joueur cambrioleur et escalader la clôture barbelée...

Avant de dormir, on profite de la connexion wifi pour poster quelques news sur le blog.

Journal de bord, le 2 avril de l'An de grâce deux Mil douze

Ce matin, chouette balade à vélo dans la réserve naturelle. Il fait (très) frais mais plutôt beau. Beaucoup de cigognes occupées à couver sur leur énorme nid, parfois dans le jardin même de certaines maisons.

Les éléments semblent être avec nous aujourd'hui, le vent est tombé ce qui facilitera la navigation avec le moteur d'étrave toujours en panne. On navigue pendant trois heures à travers de superbes paysages. C'est plat mais c'est beau. Des petits canaux sinueux, d'immenses lacs, des oiseaux aquatiques qui s'envolent à notre passage. On se pose pour la nuit dans un port en bordure de lac. Apéro sur un banc pour profiter du coucher de soleil et admirer le héron venu pêcher à quelques mètres de nous... et deux canards qui en avaient après nos Chipito.

Avant de dormir, on se fait une petite toile sur notre "boat cinéma" improvisé. Qui a dit que l'iPad était un gadget inutile ?

Journal de bord, le 1er avril de l'An de grâce deux Mil douze

Tout avait pourtant bien commencé...

Après une nuit un peu frisquette mais calme, on est d'attaque pour passer notre premier pont mobile. On stoppe le bateau devant le feu rouge, le pont se lève, on s'avance tout doucement dans l'étroit passage, le gardien du pont balance un sabot (ça ne s'invente pas !) au bout d'une corde pour récupérer le droit de passage et puis ouf, on est de l'autre côté. On navigue sur des petits canaux calmes qui serpentent dans la campagne et des villages mignons tout plein.

J'ai repéré notre itinéraire sur la carte... mais je me suis planté sur l'interprétation d'un pont qui a rétréci à 1,5 m au lieu de 15 m ! Du coup, avec nos 2,5 m, ça ne passe pas. Barre à bâbord toute, demi-tour, on passera par une autre route. Sur un grand canal plus fréquenté, on croise nos premières grosses péniches de transport. Gloups, le Hertog a l'air minuscule à côté ! À midi, arrêt à Grouw pour essayer les vélos pliables qu'on a emportés (merci Mum). Ici aussi, c'est croquignolet : petites maisons proprettes, jardinets sans un brin d'herbe qui dépasse, déco kitch de rigueur avec sabot pendu au mur, faux héron sur la pelouse, etc. La classe à la frisonne quoi ! On mange à bord, puis une petite sieste et on est reparti, direction la réserve naturelle Oude Venen. La navigation est très agréable et on commence à avoir le bateau bien en main. C'est là que les choses ont commencé à partir un peu en vrille (pour rester poli).

Gros stress tout d'abord à un pont mobile devant lequel on attend... sans que le gardien veuille l'ouvrir. On se représente trois fois sans succès avant de renoncer et d'aller demander conseil un peu plus loin. Un brave type appelle le gardien du pont avec la radio de bord. Finalement, il s'avère qu'il ne voulait pas nous ouvrir car on pouvait passer directement sous le pont... à condition d'abaisser le petit mât amovible à l'avant du bateau ! On a l'air bête parfois dans la vie.

Ensuite, l'accostage au port en fin d'après-midi n'est pas évident avec le vent qui continue de souffler fort. On n'est pas les seuls d'ailleurs à avoir du mal car on doit aider un groupe d'Allemands qui arrivent avec un gros yacht. À peine arrimé, une dame du port vient nous dire qu'il faut changer de place parce que le courant ne fonctionne pas ici. Fait %¥€&@ !!! Rebelotte pour toutes les manœuvres. Et pour couronner le tout, le moteur d'étrave vient de nous lâcher. Or sans ça, c'est coton pour accoster avec un tel vent. Mais bon, pas le choix et avec l'aide de quelques personnes sur le quai, on y arrive. Ouf, croyait-on mais la journée n'était pas terminée. Le temps de dîner et paf, c'est la panne de courant dans le port. Pas de chauffage donc pour cette nuit. Tant pis, ça nous rappellera notre trek sur le Rinjani : chaussettes, polaire, bonnet et au lit.

Journée un peu rude donc mais bon, comme aime à le rappeler un ami à moi, la vraie vie commence où finit notre zone de confort. À méditer sous la couette...


Journal de bord, le 31 mars de l'An de grâce deux Mil douze

Grande première pour ces vacances de Pâques : nous avons loué un bateau pour faire une escapade d'une semaine sur les lacs et canaux de la Frise, dans le nord des Pays-Bas.

Ce samedi matin, nous quittons Bruxelles de bonne heure pour aller prendre possession de notre vaisseau au port De Welle à Heerenveen. N'a-t-il pas fière allure le Hertog ?

L'avitaillement fait, nous sommes prêts pour les instructions... in het Nederlands zeker ! Le type commence par quelques notions générales de navigation, puis on passe aux explications sur l'immense carte qui servira à tracer notre route pour la semaine. Alors, une carte fluviale, c'est comme une carte routière mais avec dix fois plus d'indications dessus ! Mais bon, le plus important finalement, c'est de surveiller la profondeur des voies d'eau et la hauteur des ponts.

Allez, il est temps de monter à bord pour nous expliquer le fonctionnement du bateau. Bon, pour allumer le moteur, pousser la manette, tirer le bitougnot, tourner la clé, appuyer deux fois sur le bidule, arrêter de respirer... et ça y est, ça démarre ! Ça va, vous avez retenu ? Il y a aussi tous les nœuds pour arrimer le bateau : attacher la corde au truc, la passer dans le machin, faire trois fois le tour du bidule... En quinze minutes on emmagasine un max d'infos. Trop...

Maintenant en route pour quelques rudiments de pilotage et surtout pour apprendre la manœuvre cruciale : accoster. Pas évident, surtout avec le vent qui souffle à fond. En tout, "l'instruction" aura duré moins d'une heure. Autant dire pas assez et on ne se sent pas super à l'aise quand le gars nous lance un "bonne chance et à dans une semaine". On se lance tout de même puisqu'on est venu pour ça. Advienne que pourra ! Diriger le bateau sur un canal s'avère finalement plutôt facile.

On profite du premier ponton qui se pointe pour s'exercer à l'accostage... et se taper nos premières frayeurs. Après trois tentatives ratées et avoir failli perdre Romy sur le rivage car elle n'arrivait presque plus à remonter à bord, on abandonne en espérant trouver un endroit plus facile ailleurs. Il y a vraiment trop de vent ici et ça complique vachement les choses. On poursuit vers le petit port d'Akkrum où on parvient tant bien que mal à s'arrêter et à arrimer notre coquille de noix. Il y a un peu d'énervement dans l'air avec le stress mais on en a vu d'autres. Une balade au village pour se changer les idées et faire quelques emplettes. On a bien mérité notre apéro après toutes ces émotions ! Notre première soirée à bord nous réconcilie avec le bateau : un bon vol-au-vent, un épisode de Game Of Thrones, puis dodo.